Le marché de Plainpalais sous tension

Lassés par la hausse des larcins, les marchands et brocanteurs de la plaine demandent des mesures. Associations et autorités municipales voudraient également que la loi sur la mendicité soit appliquée. Une présence policière renforcée est aussi requise pour mettre fin à ce climat de plus en plus malsain.

  • Les vendeurs du marché de Plainpalais dénoncent les vols sur leurs étals. TR

    Les vendeurs du marché de Plainpalais dénoncent les vols sur leurs étals. TR

«Nous sommes plutôt face à un sentiment d'insécurité»

Jean-Philippe Brandt, porte-parolede la police cantonale

«Ras-le-bol des voleurs et des mendiants insistants. Il faut réagir avant que ce soit trop tard!», s’écrie Samuel, vendeur de vêtements sur le marché de Plainpalais. Même son de cloche au stand voisin: «Dès qu’on tourne le dos, ils prennent nos marchandises et font les poches des clients. Aujourd’hui, les personnes âgées ont peur de venir», déplore Stanislas, brocanteur. A l’origine de leur colère: une forte hausse des vols ces derniers mois.

Les commerçants demandent à la Ville de Genève de réagir, notamment en renforçant la présence policière. «Nous ne voyons quasiment pas les forces de l’ordre», insiste Patricia Richard, présidente de l’association des marchés contemporains genevois et boulangère de profession. Pour elle, les agents de «l’unité marchés» ne suffisent pas. «Ils n’ont pas assez de compétences et ne peuvent souvent pas intervenir en cas de problème», regrette la conseillère municipale PLR .

«Sentiment d’insécurité»

Reconnaissant que le marché de Plainpalais est un point de friction, la police cantonale n’a toutefois pas enregistré de hausse des larcins. «Nous sommes plutôt face à un sentiment d’insécurité qu’une insécurité factuelle», juge Jean-Philippe Brandt, son porte-parole. Il invite les victimes à venir déposer plainte.

Reste que Patricia Richard, comme de nombreux marchands, sont formels: les vols sont en augmentation. Un phénomène qui coïncide, selon eux, avec l’assouplissement de l’application de la loi à l’encontre des mendiants (lire ci-dessous). «Il faut que la loi sur la mendicité votée par le Grand Conseil soit appliquée au plus vite», suggère l’élue PLR.

Du côté de la Ville, on plaide également pour un changement rapide. «Les marchands et les associations représentatives des marchés évoquent des scènes où les mendiants viennent en bande organisée, parfois avec des talkies-walkies et des rabatteurs», relate Janine Truffer, cheffe de l’unité marchés au Service de l’espace public de la Ville.

Et de préciser qu’il serait souhaitable qu’une réglementation plus stricte soit appliquée sur les marchés. «D’après les vendeurs, la tolérance à l’égard des mendiants engendre un sentiment d’injustice chez les marchands, une problématique que l’on retrouve également sur le marché du boulevard helvétique, qui se heurte aux mêmes difficultés. Ces mendiants se sentiraient à l’aise, comme s’ils étaient sur leur territoire.»

«Personne ne nous aide!»

En attendant une possible évolution, la police municipale a intensifié ses patrouilles sur les marchés, assure Cédric Waelti, porte-parole du Département de la sécurité et du sport de la Ville. «La présence de mendiants ainsi que la mendicité sur l’espace public ne sont pas punissables en tant que telles», rappelle toutefois le communicant.

«Personne ne nous aide, à part la police. Mais, le temps qu’elle soit là, il est souvent trop tard», se désespère Jean, qui vend des housses de téléphones et des chargeurs à Plainpalais. «Les marchands vont finir par se faire justice eux-mêmes», prévient-il.

Nouvelle loi sur la mendicité

L’association des marchés et celle des brocanteurs ont toutes les deux déjà fait part de leur «exaspération» aux députés de la commission judiciaire. Un sentiment partagé par le Trade Club, qui représente Coop et Migros, qui demande lui aussi à être auditionné par le Grand Conseil devant l’explosion de la mendicité.

Pour rappel, l’interdiction de mendier avait été suspendue après une décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) datée du 19 janvier 2021. Mais cela pourrait à nouveau changer: si la nouvelle loi du 14 décembre 2021 était appliquée, les mendiants devraient éviter certaines zones, comme les distributeurs d’argent et les caisses de parking.