Révolution de «palais» chez les cafetiers

  • Pour son 130e anniversaire en 2018, la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève (SCRHG), mitonne une véritable fête aux petits oignons.
  • Au menu: professionnaliser, certifier et revaloriser un métier en pleine évolution.
  • Interview de son président Laurent Terlinchamp qui annonce aussi des cadeaux à la louche.

  • LaurentTerlinchamp: «Le métier est simplement beaucoup plus réglementé qu’auparavant.»  FRANCIS HALLER

    LaurentTerlinchamp: «Le métier est simplement beaucoup plus réglementé qu’auparavant.» FRANCIS HALLER

«Il est révolu le temps du tenancier souvent absent, qui ne gère pas son établissement et ses employés»

Laurent Terlinchamp, président de la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève

GHI: La Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève (SCRHG), qui compte 1550 établissements, célébrera en 2018 son 130e anniversaire. Quels sont les points forts de cette célébration?

Laurent Terlinchamp: Nous avons des cadeaux à la pelle! Les prix de la formation en vue de l’obtention du diplôme cantonal de cafetier seront revus à la baisse: nous octroyons un rabais de 1000 francs à tous nos élèves durant toute l’année 2018. Nous allons aussi créer une formation continue novatrice pour les patrons de bistrots et restaurants.

– Elle n’existait pas?

– Hélas non! Aujourd’hui, un patron doit être présent. Il est révolu le temps du tenancier souvent absent, qui ne gère pas son établissement et ses employés. Le chef doit non seulement être aguerri aux obligations administratives et sociales, mais aussi aux nouvelles formations de ses apprentis. Révolue aussi l’époque de la formation sur le tas. Cette pratique est devenue insuffisante face à la réalité du marché.

– Concrètement, quelles sont les nouveautés dans les formations?

– Elles sont destinées à toutes les branches de la restauration, du patron à l’employé en passant par l’apprenti. Je parle ici des cours de gestion d’entreprise, d’accueil de clients, de service, de décoration. Les apprentis sont aussi mieux suivis par leur patron. Leur certificat fédéral de capacité leur ouvre désormais la voie à l’obtention de la maîtrise fédérale. Nos formations sont aussi les seules reconnues par GastroSuisse, l’organisation patronale suisse de l’industrie hôtelière et gastronomique.

– En quoi le métier a-t-il changé?

– Avec la multiplication des points de vente des fast-foods et des sandwicheries ainsi que la venue des food-trucks, les restaurateurs ont dû s’adapter, se renouveler et se réinventer.

– Des exemples?

– Outre les traditionnels plats du jour, les cartes proposent les mêmes offres que dans les établissements de restauration rapide, comme des hamburgers, sandwiches, salades, en version revisitée ou gastronomique, sur assiette ou à l’emporter. La grande nouveauté est le service de livraison, de plus en plus fréquent.

– Au fond, cela fait bientôt vingt ans que vous essayez de vous adapter?

– Oui sur tous les plans! Ça a commencé par la crise économique à la fin des années 2000 qui a provoqué une valse de remises de commerces. En raison de l’abolition du numerus clausus, le nombre d’établissements n’a en effet plus été limité. Puis, des changements dans la législation sont intervenus, comme la baisse du taux d’alcoolémie autorisé pour la conduite qui nous a incités à créer des mets en accord avec des vins proposés au verre.

– Et qu’en est-il de l’interdiction de fumer dans les établissements publics votée en 2008?

– Ce grand chambardement a radicalement changé la manière de consommer. Nous en subissons encore les dommages collatéraux, telles les nuisances sonores des fumeurs sur les trottoirs. Nous sommes obligés d’engager des agents de sécurité pour les surveiller. Un énorme effort!

– La nouvelle loi sur la restauration et le débit de boissons vous oblige aussi à vous mettre en conformité?

– Oui, mais cette loi est une plus-value pour notre métier, car elle remet en valeur l’image et la crédibilité de la profession (GHI 02.11.17).

– Le métier devient-il trop contraignant à votre goût ?

– Le métier est simplement beaucoup plus réglementé qu’auparavant. Je suis admiratif face aux capacités d’adaptation et au courage des restaurateurs. Je suis également reconnaissant aux clients qui continuent de fréquenter nos établissements et incitent les tenanciers à suivre cette évolution.

Les Genevois mangent autrement

Aujourd’hui, les habitudes des Genevois pour manger ont totalement changé, reconnaît Laurent Terlinchamp. «Le client de midi mange rapidement sur le pouce, au bureau, se fait livrer des repas. Le soir, la classe moyenne privilégie les bars à vins proposant des en-cas du terroir, des apéros dînatoires. A midi, les jeunes se posent dans un parc, sur un banc et avalent des fast-foods, salades ou sandwiches, tout en buvant des sodas. Le soir ils vont au bistrot entre amis en sirotant des cocktails ou alcools forts.» Si l’on ajoute à cela l’interdiction de fumer dans les établissements publics, de nombreuses personnes ne voient plus d’intérêt à prendre leur pause au café.